Quand j’étais étudiant…

Je fais partie de ce que l’on se plaît à nommer la Génération X, la génération no future, la génération perdue, la génération des enfants des Early Baby Boomers, celle pour laquelle il y avait plus de candidats que de jobs à la sortie de nos études…

Même si je suis maintenant dans la trentaine avancée ;-), je dis souvent que j’ai encore 20 ans… dans mon cœur. En effet, une des plus belles périodes de ma vie, c’est quand j’ai fait mes études universitaires au Baccalauréat et ensuite à la Maîtrise en Administration des Affaires à l’Université de Sherbrooke dans les années 90. C’est pas si loin mais quand j’entends et je vois les étudiants universitaires ces temps-ci, je me dis: « Mais qu’est-ce qui a bien pu se passer pour que je me sente à ce point déconnecté de leur monde, de leur réalité? » Celle-ci me semble tellement différente de la mienne au même âge. Pourtant à peine 15 ans nous séparent…

Au risque de sonner vieux, j’ai pris plaisir à sortir quelques éléments qui font qu’aujourd’hui, cette période est gravée à jamais dans ma mémoire.

  • Starbucks n’existait pas. Quand on voulait étudier, on s’achetait une grosse canne de Folgers pis on se coulait des Silex géants. On étudiait en groupe dans le sous sol d’un copain. C’était l’fun et économique.
  • L’ Université de Sherbrooke était la seule à offrir le régime coopératif permettant aux étudiants de faire des stages rémunérés en milieu de travail pendant leurs études. Ces revenus additionnels m’ont permis de compléter mes études avec moins de dettes et d’avoir un an d’expérience en finissant. J’ai appris beaucoup pendant ces 3 stages.
  • Je n’avais pas de téléphone cellulaire (en fait, personne en avait) et certains de mes amis n’avaient même pas de téléphone à ligne dure à leur appart. On était capable de se rejoindre et de se parler quand même assez souvent.
  • Quand on voulait se payer du resto pour décrocher, on allait prendre un maudit gros déjeuner-diner pas cher. Je me commandais un « Bonjour-Matin » chez Eggsquis, le café était à volonté avec un gros pichet direct sur la table. Calories, caféine et évasion temporaire à bon prix.
  • On organisait nos propres partys à la Faculté, on obtenait des rabais volume de Molson nous permettant de vendre la bière 1,50$. On trouvait le tour de faire de l’argent pareil. C’était l’fun et économique.
  • Mes amis se promenaient en Volkswagen Fox très très très usagées ou en Toyota Tercel de 300 000 km payée 200$ ou avec d’autres bagnoles rafistolées ultra polluantes. Moi j’étais chanceux. Mon père m’avait vendu 4500$ une Toyota Camry 87 rouillée. Je lui ai remboursé au complet une fois sur le marché du travail. J’ai appris que toute dette doit être remboursée même pour un char fini.
  • Pour me rendre à l’université, j’y allais à pied pour ne pas payer de stationnement.
  • Quand je sortais de Sherbrooke avec ma voiture, je remplissais mon auto avec des pouceux d’Allo-Stop pour payer mon essence qui se vendait 0,45$ /litre à l’époque.
  • Une grande partie de mes amis n’avait pas de voiture et s’organisaient. Il n’ont rien manqué à cause de cela. C’était juste plus tannant pour faire leur épicerie mais on s’entraidait.
  • Quand on a voulu faire un voyage dans le sud, on s’est organisé un Séminaire en Marketing International au Mexique. On est allé visiter des entreprises là bas avec notre prof. On a payé avec quelques party, un tirage d’un voyage dans le sud et un peu de nos économies.
  • Mon entourage immédiat n’était nullement constitué de ce que certains carrés rouges appellent avec mépris « gosses de riches« . C’était essentiellement des jeunes animés d’une passion commune qui savaient qu’un avenir meilleur, rempli de défis, les attendait après leurs études universitaires.
  • Certains s’endettaient plus que d’autres mais tous savaient que ce qu’ils décrocheraient au bout de leurs années d’efforts, avait une valeur pour et dans la société; que ce n’était pas gratis. C’était un passeport pour accéder à mieux. Tous comprenaient que c’était les règles du jeu. Tu t’instruis, tu investis temps ET argent et tu peux aspirer à quelque chose de mieux que si tu étais resté assis sur ton steak.

Pourtant, à mon souvenir, personne n’a manifesté ou n’a senti le besoin d’aller dans la rue quand le gouvernement en place a décidé d’ajuster les frais de scolarité afin qu’ils reflètent mieux la réalité de ces années.(voir graphique ci-bas)

Donc, pendant mes études universitaires, le plus gros rattrapage a été effectué en matière de frais de scolarité. De 1990 à 1996, hausse drastique. Personne ne s’en est offusqué. C’était normal. Du rattrapage. C’est cela vivre démocratiquement en société, c’est faire sa part et ne pas croire que tout nous est dû.

Alors pourquoi tant de bruit  en 2012 pour un simple ajustement des frais de scolarité alors que la situation des finances publiques est encore plus précaire qu’en 1990? C’est de l’égocentrisme crasse.

Je pense que le vrai débat se dissout dans plein d’autres revendications anticapitalistes qui viennent déformer les discussions et qui n’ont pas leur place dans CE débat sur les frais de scolarité. C’est en partie pour cela que plusieurs ont peur de se prononcer sur ce débat parce que la CLASSE l’étend et le déforme. Sur le fond, cette hausse est tout-à-fait logique. Si on juge que celle-ci doit être mise en place, n’ayons pas peur d’exprimer notre opinion.

Plus de détails ici si les faits et les chiffres vous intéressent.

L’accès n’en sera pas diminué. De toute façon, pour paraphraser mon bon ami Martin:

« Dans les faits, le vrai « driver » d’aller ou non aux études au Québec est le DÉSIR ou non de faire des études post secondaires. That’s IT. »